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Des outils pour mieux fliquer ?

Elle est étrange cette notion de contrôle parental dès qu’il s’agit d’écran. Le terme même invite à exercer une domination et une surveillance accrue sur nos enfants, plutôt qu’à les accompagner dans la découverte des outils numériques. Quatre types d’outils dit de “contrôle parental” existent. Ceux pour limiter l’accès à certains sites ; ceux pour limiter le temps d’écrans, qu’il s’agisse de télé, smartphone ou console de jeu ; ceux pour géolocaliser via une montre connectée ou un smartphone ; et enfin la crème de la crème, ceux pour espionner les conversations, recherches web et historiques sur tablette ou smartphone, le tout potentiellement à l’insu de son enfant. C’est tout un arsenal de surveillance qui est mis à la disposition des parents pour fliquer leur progéniture.

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Une nouvelle majorité numérique

Il y a quelques années, il fallait presque être ingénieur·e informatique pour installer correctement l’ensemble de ces garde-fous. Désormais, il devient de plus en plus facile de pister et contrôler les accès de nos bambins. Les Fournisseurs d’accès Internet sont même tenus de mettre à disposition des familles des outils de contrôle parental fiables et faciles d’utilisation, afin de permettre à tous et toutes de protéger au mieux leurs enfants de contenus en ligne ou programmes. Internet n’est pas une zone sûre, personne ne pourra dire le contraire. Et pour protéger les mineurs, de nouvelles mesures sont prises par l’Etat. Les sites pornos sont invités à revoir leur copie, et à proposer un système d’accès véritablement interdit aux mineurs, comme nous l’avions déjà évoqué il y a quelques semaines. Ils ont jusqu’à septembre 2023 pour se mettre au pas. L’Assemblée s’apprête aussi à changer l’âge de la majorité numérique, qui impacte notamment le consentement face à la récolte de données. Si aujourd’hui, les réseaux sociaux sont généralement destinés aux enfants à partir de 13 ans, dans un calque de la loi Américaine Children’s Online Privacy Protection Act, cet âge d’accès aux réseaux sociaux pourrait être relevé de deux ans en France, avec un accès aux réseaux sociaux sans permission parentale permis à 15 ans.

De nouvelles libertés ?

15 ans pour rappel, c’est déjà l’âge de la majorité sexuelle en France. Un âge qui « correspond à un moment de maturité dans le cycle de croissance des individus », éclaire la députée Paula Forteza (LREM) qui a déposé le texte auprès de l’Assemblée Nationale. Peut-on dès lors considérer que cet âge de majorité numérique pensé à 15 ans, prévu à 16 ans par le RGPD, doit valoir aussi pour tous les autres outils de contrôle parental ? On ne s’étonne pas qu’un enfant de 10 à 12 ans, qui découvre l’autonomie, le fait de rentrer seul de l’école, en milieu urbain ou rural, qui a son premier smartphone, doit être accompagné dans la découverte de cet outil ô combien attendu et désiré. Faut-il pour autant permettre l’utilisation de ce pistage, de cette privation de liberté et d’intimité après 15 ans, alors même que la loi envisage de penser cet âge comme celui d’une majorité numérique où l’adolescent « peut consentir seul à un traitement de données à caractère personnel » ? Sur la question du logiciel de pistage, selon le psychologue Michael Stora, « il n’aide pas l’enfant à s’autonomiser et peut même renforcer des conduites à risques ». Il s’agit aussi d’un rapport de confiance à instaurer entre les parents et leurs enfants, une confiance à ne pas briser, dans les deux sens.

Une chose reste certaine. La liberté des unes/des uns s’arrête là où commencent celles des autres, et c’est vrai aussi pour nos enfants quand ils deviennent grands.