Le concept d’industrie 4.0 ou quatrième révolution industrielle s’affirme comme la convergence du monde virtuel de la conception numérique et de la gestion des produits et objets du monde réel. Aujourd’hui, c’est une révolution profonde qui se profile avec le « machine learning ». Des masses d’informations numérisées (le big data) sont traitées algorithmiquement par des machines à des vitesses et dans des grandeurs inhumaines. L’intelligence artificielle (IA) va déferler à travers des robots, de la réalité virtuelle et des univers virtuels sans comprendre et anticiper les conséquences pour l’humain et la société. Nous vivons une accélération fulgurante des technologies numériques et d’IA, qui concernent tous les sujets du quotidien et de la société, participent à notre environnement social et culturel.

Autre visage de ce déferlement de l’IA sans cadres, le métavers promis par Facebook, alias Meta. Un savant mélange d’IA, de réalité virtuelle, d’haptique, de jeux, de marketing, de publicités, de cryptomonnaies et de NFT (Non Fungible Token, en français « jetons non fongibles »). Le métavers est un univers virtuel dans lequel on s’oriente comme s’il s’agissait d’un espace réel, en étant représenté par un avatar en 2D ou 3D, comme dans un jeu vidéo. Trois règles principales le définissent : il s’agit d’un monde infini sans frontières, d’un monde où on peut gagner et dépenser de l’argent et d’un monde immersif utilisant la réalité virtuelle ou augmentée. On pourra également y travailler. Demain, Microsoft va nous proposer Mesh, sa plateforme collaborative à base d’expériences virtuelles. L’idée est de combiner les technologies de réalité mixte de Microsoft (avec son casque HoloLens) pour enrichir les réunions et autres visioconférences de travail, grâce notamment à l’ajout d’avatars. Les métavers sont des ensembles d’espaces virtuels où chacun pourra créer, explorer, échanger avec d’autres personnes sans se trouver dans le même espace physique. Ce sont avant tout des dispositifs numériques qui vont collecter énormément de données sur nous.

À la croisée des chemins, entre l’industrie et le métavers, le « jumeau numérique » est un modèle virtuel qui représente au plus près un objet ou un système réel, de manière à pouvoir effectuer des simulations représentatives de son fonctionnement et d’évaluer les conséquences de modifications ou d’actions sur lui. Pour créer un jumeau numérique, il est nécessaire d’avoir beaucoup de données sur la personne. Plus le nombre et la diversité des données est importante, plus le jumeau numérique sera proche de son modèle original. Des travaux sont menés sur la réalisation de jumeaux numériques dans plusieurs domaines dans l’industrie, y compris la médecine, en représentant par exemple nos corps et nos organes. Avec les nouvelles avancées technologiques (deep learning, transformers) des chatbots (« agents conversationnels »), il est même devenu envisageable de réaliser un « jumeau numérique conversationnel » qui reproduise à l’aide d’outils d’intelligence artificielle le comportement langagier et la voix d’une personne.

Quels choix faire en politique pour se servir de l'IA et non être asservie à travers elle ?

Il est temps que les politiques prennent conscience de la profondeur des influences et mutations induites par le numérique et l’IA sur l’humain et la société. La convergence technologique est présentée comme la possibilité de mieux comprendre le corps-objet et de développer des outils qui permettront « une interaction directe homme machine », c’est le cas du métavers. De grandes questions éthiques vont se poser, de plus en plus. Qui pourra maîtriser ces mondes numériques tentaculaires ? Quels choix faire en politique pour se servir de l’IA et non être asservie à travers elle ? Le déploiement de ces technologies appelle à une prise de conscience collective pour que ces sujets soient débattus lors de la campagne présidentielle de 2022 et très largement ensuite dans la société.