Dans la tech de Charcot

Quand on pénètre dans l’appartement, il faut suivre le souffle régulier du respirateur artificiel pour trouver Michel dans son salon. Une synthèse vocale lance un « bienvenue », que le regard rieur de cet ancien président de laboratoire pharmaceutique complète d’un éclat chaleureux. Depuis 2015, il est atteint d’une sclérose latérale amyotrophique (SLA), plus connue sous le nom de maladie de Charcot. Cette maladie neuromusculaire dégénérative lui a progressivement paralysé tout le corps. À voir un esprit si vif enchevêtré dans un réseau de tuyaux et de machines, difficile de ne pas penser au locked-in syndrome que le journaliste Jean-Dominique Bauby décrit dans Le Scaphandre et le papillon. Mais la comparaison s’arrête là.

Grâce à une tablette et une commande oculaire détectant le mouvement de ses yeux, Michel dit avoir retrouvé la « liberté ». Aidés d’un logiciel d’autocomplétion, ses iris bruns sélectionnent les lettres du clavier virtuel qui s’affiche sur la tablette maintenue verticalement devant lui. Le ballet oculaire dure quelques minutes, le temps de former ces phrases, énoncées par une synthèse vocale elle aussi déclenchée d’un mouvement d’œil : « La commande oculaire, c’est le seul médicament qui existe contre l’évolution de la SLA. En ce qui me concerne, je peux vous dire que sans elle, je serais mort depuis longtemps. » Le cinquantenaire est catégorique : cet outil, que lui a prêté l’ARSLA (Association pour la Recherche sur la SLA), lui a « changé la vie ».