Depuis une décennie, le caractère uniforme de celles et surtout ceux qui font le secteur du numérique est sans relâche dénoncé. Des initiatives se nouent, des réseaux se forment, des médias s’emparent de la question – n’est-ce pas l’une des raisons d’être de Chut ! magazine ? Les chiffres, eux, bougent peu. Le nombre d’étudiantes en filières ingénieur peine à dépasser le tiers des effectifs. Dans la vie active, les rangs féminins sont toujours aussi clairsemés. Selon le dernier rapport de l’Unesco, les femmes ne représentent que 22 % des professionnels en intelligence artificielle. Une étude du cabinet Deloitte soulignait que seuls 20 % des postes techniques sont occupés par des femmes.

Un autre constat peut être tiré de cette décennie de mobilisation. Elle n’est portée quasiment que par des femmes. Il n’est pas rare d’assister à un événement consacré à la place des femmes dans la tech, parmi un public 100 % féminin. Où sont les hommes ? Leur présence est souvent faible dans ces débats essentiels. Au sein de grandes entreprises, où des réseaux de sororité se nouent, un public masculin peut venir assister à une conférence sur un sujet généraliste – l’IA par exemple – même si les femmes sont seules en tribune. Mais sur le sujet spécifique du sexisme du secteur, on ne les compte même pas sur les doigts d’une main.

Une étude menée par McKinsey montre que les entreprises avec une diversité de genre supérieure dans leurs équipes de direction sont 21 % plus susceptibles de surpasser leurs concurrents en termes de rentabilité. Pourtant, ce message n’atteint pas assez d’hommes.

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Ils ont intérêt à l’égalité

Pourtant, le défi ne se relèvera pas sans l’engagement des hommes pour une tech qui reflète mieux la réalité de notre société. Plus que des alliés, des parties prenantes, qui ont, eux aussi, intérêt à l’égalité des droits. Pour profiter de la dévirilisation du monde. Ou plus prosaïquement, pour bénéficier sans culpabilité de congés parentaux, par exemple.

Concrètement, l’engagement des hommes dans cette lutte pour l’égalité est un axe de travail majeur de la nouvelle commission dédiée aux femmes dans le numérique du syndicat patronal Numeum, renommée Nova in Tech. Il s’agit d’abord de comprendre pourquoi les hommes ne se sentent pas concernés. Faut-il revoir le vocabulaire, parler de mixité plutôt que de féminisation ?

Prendre la parole sur la mixité

Pour que les hommes s’engagent, sans doute faut-il, paradoxalement, que plus d’hommes prennent la parole sur la mixité. Le message passera peut-être mieux vis-à-vis de leurs pairs ?

Nous devons également valoriser les hommes qui soutiennent activement l’égalité. Et instaurer là aussi une mixité : visibiliser tout autant que les femmes qui s’engagent, les hommes pour lesquels elle est une évidence. À l’instar du travail de long terme sur l’évolution des mentalités qu’a réalisé l’association « Jamais sans elles », il faut l’affirmer : la parité dans la tech, ce ne sera jamais sans eux. Les portes de ce club sont à ce titre grandes ouvertes.

Les membres du Club qui ont participé à cette tribune :

Caroline Barkhou, Cécile Biasio, Leila Bouzouaid, Nelly Brossard, Maud Cailly, Mélissa Cottin, Sandrine Delage, Andréa Dih Kahn, Tania Gombert, Sabrina Hohengarten, Stéphanie Lopez, Sophie Lubin, Laurie Mézard, Delphine Morandet, Lorène Pagès, Maylis Staub, Barbara Sessa, Brigitte Tropenat.