N. Beuve et T. Marty : « Avec l’IA, il faut de plus en plus d’énergie pour exécuter la moindre requête »

Mesurer l’impact écologique réel de la vie numérique n’est pas une mince affaire. Comment savoir où placer ses efforts ? Les réponses de Nicolas Beuve et Thibaut Marty, enseignants-chercheurs à l’INSA Rennes.
Comment mesure-t-on l’impact écologique d’un objet électronique ?
NICOLAS BEUVE : On mesure l’impact écologique d’un objet, qu’il s’agisse d’un téléphone ou d’une carte graphique, avec ce qu’on appelle l’analyse du cycle de vie (ACV). Une ACV permet de calculer seize valeurs d’impacts environnementaux : la plus connue est l’émission de CO2, mais il y a d’autres critères : l’extraction des ressources minières, l’utilisation de l’eau, l’acidification des eaux salées, l’utilisation des sols, le développement d’algues, etc.
THIBAUT MARTY : Le problème, c’est qu’il y a beaucoup de choses qu’on ne voit pas dans les services numériques : tous les serveurs reliés au data center, tous les routeurs connectés à l’antenne 4G, bref toute la colonne vertébrale d’Internet. Quand on essaie de faire l’analyse du cycle de vie de Netflix par exemple, il faut prendre en compte une proportion de tous les routeurs Internet qui diffusent Netflix. Ce qui complique aussi le calcul, c’est ce qu’on appelle l’effet rebond. Mettons par exemple que je vous dise que visionner un film en streaming est moins polluant qu’aller en voiture dans une boutique, qui demande de l’éclairage et la climatisation, pour y louer un DVD. C’est vrai, mais cela ne prend pas en compte le fait que quand on est sur Netflix, on va avoir tendance à regarder beaucoup plus de films que si on devait sortir pour le louer. Le numérique fait exploser les usages.
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