Quel regard portez-vous sur le numérique et ses enjeux en 2022 ?

JEAN-FRANÇOIS CAPLAT. La pandémie de Covid-19 a montré à quel point le numérique est devenu omniprésent dans nos vies. Son apport aux activités humaines est incontestable, mais nous ne devons pas oublier que le monde numérique n’a rien de virtuel. Pour fabriquer un ordinateur portable, il faut en moyenne 600 kilos de matières premières. Le numérique met donc en jeu les ressources planétaires, mais également nos ressources sociales et psychiques. Il affecte nos relations interpersonnelles et notre manière de nous relier au monde. Les enjeux relatifs à l’hyperconnexion, à l’isolement ou à la sédentarité méritent toute notre attention, d’autant plus que celle-ci est de plus en plus menacée par notre dépendance aux écrans.

Quelle est votre définition du numérique responsable ?

FABIENNE AMADORI. Notre vision du numérique responsable consiste à regarder le numérique pour ce qu’il est : une ressource précieuse et critique. Le paradigme actuel nous met dans une impasse. Ce que le numérique nous fait perdre d’un point de vue environnemental est plus important que ce qu’il nous apporte dans le travail ou la communication. Nous devons évoluer vers des usages numériques plus sobres, moins énergivores, et réfléchir à des manières de mettre le numérique au service de causes qui ont du sens.

Comment avez-vous été amenés à vous y intéresser ?

F.A. En tant qu’Entreprise de Services du Numérique, nous avons eu très tôt la conviction que la responsabilité sociale et environnementale est aussi importante dans notre développement que la performance économique. Nous avons été pionniers dans la mise en place d’une cellule « Happiness Committee » chargée de développer les projets santé et environnement de l’entreprise. Cela a débouché, par exemple, sur le programme « Isiamouv’ », co-construit par les collaborateur·rices pour sensibiliser et informer sur les risques de la sédentarité au travail. Côté environnemental, nous avons organisé un ramassage de déchets le jour du World Cleanup Day. Ces préoccupations éthiques et environnementales nous ont naturellement amené·es à nous questionner sur notre coeur de métier. Le numérique responsable est finalement la rencontre de notre engagement RSE avec le numérique. Notre démarche a été très soutenue par notre rencontre avec l’INR (Institut du Numérique Responsable) et la découverte du label « Numérique Responsable », dont nous avons été les premiers lauréats en juin 2020.

Où en sont les organisations dans leur rapport au numérique responsable ?

J.-F.C. La question a émergé il y a une quinzaine d’années, mais la structuration d’un écosystème numérique responsable est très récente. Depuis la création de l’INR en 2018, un réseau d’acteurs privés, de chercheur·ses et de collectivités publiques a élaboré un référentiel, des méthodologies et des outils mis à disposition des entreprises. Face à l’évolution des attentes citoyennes et du cadre législatif qui, au travers de la loi REEN (Réduire l’Empreinte Environnementale du Numérique), pose les jalons d’une régulation environnementale du numérique, les organisations ont compris que le numérique est un levier non négligeable pour baisser leur empreinte carbone.

Quels sont les principaux leviers qu’une entreprise peut actionner pour tendre vers un numérique plus responsable ?

J.-F.C. L’essentiel des impacts environnementaux provient de la fabrication des équipements. Les entreprises peuvent réfléchir au cycle de vie du matériel et privilégier l’achat de reconditionné ou encore œuvrer à l’allongement de la durée de vie des équipements. Elles peuvent aussi optimiser l’empreinte carbone de leur parc informatique, grâce à l’éco-conception de services numériques plus sobres, qui mettent l’accent sur les fonctionnalités essentielles et réellement utiles, tout en cherchant à réduire le volume des données traitées et stockées.

Comment s’inscrire dans ce type de démarche ?

F.A. C’est important d’y aller progressivement, de commencer par des actions simples et de communiquer sur les résultats obtenus, pour créer une dynamique en interne. La sensibilisation des collaborateur·rices et la conduite du changement pour permettre au plus grand nombre de se mobiliser est également très importante. Pour que le projet d’un numérique responsable fasse sens, il faut qu’il s’intéresse à l’organisation dans sa globalité et que ses objectifs soient définis, compris et partagés par tous les acteurs. Cela peut d’abord prendre la forme d’une charte, puis, une fois la stratégie mise en place, d’une démarche de labellisation numérique responsable.

À PROPOS DE NOTRE PARTENAIRE

Première entreprise labellisée Numérique Responsable, le Groupe ISIA (120 collaborateur·rices, 25 ans d’existence) conseille et accompagne les organisations de toute taille et tout secteur pour les aider à réduire leur empreinte environnementale et sociétale liée à l’utilisation du numérique.