A l'écoute

Drones et oiseaux

A toutes celles et ceux qui sont convaincu·e·s que les oiseaux se posent sur les fils électriques pour recharger leur batterie, cette chronique vous est dédiée !

On connaissait QAnon, Chemtrails, et d’autres théories conspirationnistes toute aussi savoureuses, et bien voici aussi « Birds aren’t real » (les oiseaux n’existent pas), qui est le nom d’une théorie conspirationniste diffusant l’idée selon laquelle les oiseaux auraient tous été exterminés dans les années 70 par le gouvernement américain afin de les remplacer par des drones chargés de nous surveiller. 

Seulement une fois n’est pas coutume dans la jungle des fake news, le créateur de cette théorie Peter McIndoe, un jeune homme de 23 ans, vient de révéler au New York Times jeudi dernier que cette théorie est un canular, une vaste supercherie, une énorme blague.  

Emulation artificielle

Parce que voilà, pendant 5 ans, la théorie a fait de nombreux émules, des adeptes au nombre de 630 000 sur TikTok. Peter McIndoe a été loin, très loin même puisqu’il a créé un petit business pour développer son mouvement, avec des objets dérivés, du genre tee-shirt et casquettes pour financer des panneaux publicitaires. 

On a pu ainsi voir des pancartes « Birds aren’t real » à Memphis, Pittsburg, New York et Chicago. Il a même été jusqu’à embaucher un comédien pour incarner le rôle d’un ancien agent de la CIA qui a confessé avoir travaillé sur le dispositif de surveillance par drones, dans une vidéo sur YouTube qui a été vue plus de 20 millions de fois. 

L’été dernier, des centaines adeptes du mouvement sont même allés protester devant le siège social de Twitter pour demander à Jack Dorsey, l’ancien pdg de Twitter donc, d’abandonner le petit oiseau bleu qui sert de logo à sa plateforme.

La folie contre la folie

Si Peter McIndoe a choisi d’avouer publiquement la supercherie, hé bien c’est parce que ce Frankenstein parodique dit avoir atteint son objectif : à savoir tourner en dérision la désinformation en lui opposant un miroir qui lui renvoie au carré l’absurdité et le grotesque qui la caractérisent. « On utilise la folie pour combattre la folie » analyse ainsi l’une des adhérentes du mouvement dans l’article du NY Times, certains membres étant, en fait, mis dans la confidence.

Les théories complotistes ont fait de l’absurdité une norme en donnant aux croyances les atours de la rationalité. Elles sont comme les lianes qui enserrent Hermione Granger à la fin du premier opus d’Harry Potter : plus on se débat contre elles, plus elles renforcent leur emprise et nous étouffent. Pour s’en débarrasser, l’héroïne doit se relâcher, se détendre. De même, « Birds aren’t real » utilise la satire pour faire passer un peu de lumière dans la jungle des contre-vérités, et pourquoi pas nous donner des pistes à explorer pour combattre les fakenews. Je remercie au passage les contributeurs de cette chronique, Stéphanie Violo, aka Chili Drop la Directrice artistique de Chut! magazine et Julien Lech’vien, journaliste chez Chut!